par Michel Blanc

La BAI est un lieu vénérable et vivant, une petite bibliothèque parisienne associative, pionnière, très originale, marquée par son histoire, mais aussi active et tournée vers l’avenir. Notre association est un espace de rencontre et de partage autour d’un but précis et exaltant : faire connaître et faire vivre ce lieu qui est bien plus qu’un Musée. Au fil des semaines, d’année en année, les rencontres s’opèrent dans une grande ouverture d’esprit, de respect des différences et de tolérance bienveillante, en un mot de Laïcité. Chacune et chacun apporte sa pierre à la hauteur de sa motivation, de ses possibilités et disponibilités. Dans une large mesure nous pouvons considérer que notre participation à l’entreprise commune relève d’une forme “d’utopie en acte” qui table sur la force du partage. Partage des tâches mais aussi des bienfaits, des engagements et des responsabilités, des savoirs et des contributions. Cette Mémoire des livres et des auteurs mais aussi des lecteurs et des sociétaires, nous la construisons en la partageant, mêlant le sérieux à la convivialité, le désir de réussir au mieux à la modestie de l’entreprise et des moyens. Malgré cette modestie nous sommes de plus en plus obligés de limiter le nombre de participants à nos soirées de lecture en imposant une inscription préalable ; de même nous devons constituer des petits groupes pour les visites les plus médiatisées comme celles relevant des journées du patrimoine, par exemple. Nous conservons cependant le principe de la gratuité de ces soirées et l’ouverture à tous : aux sociétaires et sympathisants, mais aussi pour celles ou ceux qui viennent pour la première fois et découvrent ainsi ce lieu, cette vie associative qui porte le beau nom de Bibliothèque des Amis de l’Instruction. Bien sûr être soucieux de préservation, vouloir participer à la construction et au partage de la Mémoire n’est nullement opposé à la possibilité d’utiliser les moyens les plus modernes de communication à commencer par ceux qui relèvent d’Internet. C’est pourquoi notre site a amélioré sa présentation et offre en plus des informations sur le présent et les projets en cours, l’accès aux recherches publiées, la possibilité de prendre connaissance ou de réécouter telle ou telle soirée de lecture, intervention ou conférence. De même notre Gazette du 54 qui entend bien se tourner, le plus régulièrement possible, vers les sociétaires et les sympathisants de notre bibliothèque pour permettre des communications et échanges qui ne nécessitent pas une présence physique dans le lieu consacré, au 54 rue de Turenne, dans le troisième arrondissement de Paris.

 

Je voudrais dire quelques mots sur notre vie associative à partir d’une consultation de nos fiches d’adhésion et un regard sur notre mode de fonctionnement. Ce qui frappe d’abord c’est la diversité des adhérents et un mouvement d’enthousiasme dès l’adhésion qu’il nous incombe d’essayer de maintenir, de faire fructifier. Une typologie très sommaire distinguerait la présence ininterrompue d’un noyau d’anciens que l’on pourrait appeler les “grands anciens” et que nous retrouvons dans nos instances les plus actives : “le Conseil” de l’Association, “l’équipe de bénévoles”, “l’équipe du récolement-inventaire”. Leur présence, leur expérience, leurs conseils sont des plus précieux : ces “grandes anciennes ou anciens” rendent tangible le sentiment de continuité et montrent par leur fidélité que nous gardons bien le cap. Viennent ensuite celles et ceux qui ont une expérience notable et qui ont gardé ou développé leur enthousiasme initial par des participations et des liens noués au fur et à mesure. Nous pourrions les appeler les “sociétaires ancrés”. Ces sociétaires sont très présents dans les instances les plus actives, très impliqués dans l’organisation des permanences du samedi après-midi, les visites exceptionnelles, les soirées de lecture, bref toutes les manifestations de la BAI. Chaque année nous constatons aussi l’engagement de nouveaux adhérents et leur enthousiasme réel. Nous pourrions les nommer : “les sociétaires de l’an”. Ces sociétaires sont porteurs de certaines formes de renouveau, en particulier de possibilités nouvelles, pour peu que l’on sache bien ancrer leur participation à l’entreprise commune. En quelques années de présence s’opère le glissement, l’apport fidélisé, le renouvellement tangible. Enfin il y a une quatrième catégorie de sociétaires, qui est importante numériquement et que nous n’oublions pas, ni pour ce qu’ils ont accompli, ni pour ce qu’ils peuvent encore accomplir. Ce sont les “sociétaires d’hier”. Deux grandes sous-catégories pourraient être construites : les “sociétaires d’hier au long cours” et les “sociétaires d’hier effervescents”. La première sous-catégorie rassemblerait celles et ceux qui ont participé, parfois longuement, aux activités de la BAI, qui ont œuvré à l’entreprise commune, mais pour toutes sortes de raisons, à commencer par celles de l’éloignement, des changements du mode et du cadre de vie, de l’âge et de la santé parfois, bref, de tous les aléas de la vie, ne sont guère revenus au 54 rue de Turenne. Beaucoup ont suivi de manière plus ou moins épisodique les activités proposées. Nous pouvons les appeler les “Amis de la BAI” car dans leur immense majorité ils n’ont pas renié l’œuvre commune et gardent une nostalgie du lieu et de son esprit. La seconde sous-catégorie rassemblerait celles et ceux qui n’ont pas dépassé le cadre d’une année ou deux années d’adhésion. Tout indique que ce n’est pas la déception qui a freiné leur enthousiasme natif mais des impossibilités matérielles en terme de temps de transport, d’éloignement ou tout simplement de temps disponible. Nous proposerons donc de les nommer ici : “les adhérents découvreurs”. Expliquons-nous : pour avoir enregistré ces adhésions au cours de journées de permanence ou soirées de lecture nous avons constaté que le désir d’adhérer tout de suite venait avant tout d’un mouvement d’enthousiasme suite à la découverte du lieu, de l’association, de son histoire et de son caractère vivant. Ces femmes et ces hommes ont voulu concrétiser, sur-le-champ, par un geste significatif, leur sympathie, leur solidarité, leur volonté de s’associer (certains l’ont fait sous la forme d’un don qui est parfois allé jusqu’à dépasser la somme correspondant à une cotisation annuelle). C’est dire si nous trouvons un capital de sympathie dès que nous montrons et expliquons le lieu, la bibliothèque, l’entreprise commune. Ce mouvement réel de sympathie des “découvreurs”, l’heureuse surprise qui l’accompagne est précieux et vivifiant. Nous savons que beaucoup de celles et de ceux qui n’ont eu de fait que la possibilité d’accomplir une “adhésion effervescente”, comme celles et ceux qui furent longtemps sociétaires et qui n’ont pas ou plus la possibilité de venir et revenir régulièrement au 54 rue de Turenne, ont gardé leur intérêt et leur sympathie, nous honorent de leur amitié. C’est donc à tous que s’adresse notre “Gazette du 54” ; c’est pour toutes celles et tous ceux qui agissent, adhèrent, s’intéressent ou sympathisent que nous alimentons régulièrement le site Internet de la BAI, que nous élargissons notre réseau d’échange et de communication. Ainsi à la diversité fascinante des ouvrages qui meublent les rayons de notre bibliothèque se superpose celle de ses lecteurs d’avant-hier, d’hier, d’aujourd’hui et sans doute de demain ; à ces diversités multiples et ouvertes s’ajoute celle des “joyeux” sociétaires actifs et réguliers, des amis et sympathisants éloignés, qui entendent tous contribuer à propager longtemps et loin, à leur mesure, les grands messages de la culture humaniste ; qui entendent bien vivre et faire vivre, les plus belles sentences d’un Montaigne ou d’un Rabelais, par exemple ; bref participer, en s’instruisant ou se cultivant, continûment et mutuellement, à l’universel mouvement de la Culture dans son Unité.