Michelle Magdelaine

présente

L’Exode Huguenot

Le jeudi 10 décembre 1985

1685, révocation de l’Edit de Nantes. Par cet acte d’intolérance, Louis XIV supprime le dualisme religieux en France et jette sur les routes d’Europe 300 000 protestants français qui n’ont pas voulu abjurer, plus d’un quart de million d’hommes, de femmes et d’enfants qui par conviction vont abandonner tout et chercher refuge chez leurs frères de religion, en Suisse, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Angleterre. Le Refuge, c’est le nom que l’on va donner à cet exode brutal, comme à chacun des pays d’accueil. C’est le point de départ de l’odyssée migratoire la plus importante des Temps Modernes, de la plus dramatique, mais de la plus originale aussi. Dans quelles conditions ces Français, artisans, paysans, nobles, notables du Languedoc et d’Ile-de-France, de Bretagne, du Dauphiné, vont-ils fuir ? Vers quelle destination ? Ils viennent d’un pays puissant, parfois haï, mais dont le rayonnement est incontestable. Quel accueil va leur être réservé ? A un siècle de distance, avec la Révolution et l’Empire, leurs enfants voient arriver d’autres émigrés français dans lesquels ils ne se reconnaissent pas. C’est la révélation douloureuse d’une rupture déjà consommée avec l’ancienne patrie : l’intégration dans le pays d’accueil est en marche, et beaucoup plus avancée qu’ils ne le croyaient. Comment s’est-elle effectuée ? A trois siècles de distance, quatorze historiens de plusieurs nationalités se penchent sur quelques-unes des questions qu’autorise l’état de recherches nouvellement entreprises sur cette migration sans précédents et pourtant encore mal connue.

L’étude passionnante, dont nous entretient Michelle Magdelaine, porte sur le « refuge »huguenot (ce mot couvre à la fois le lieu du refuge et la population qui s’y installe) des XVIIe et XVIIIe siècles, appréhendé à travers les sources francfortoises des « Registres pour les pauvres réfugiés du Royaume et des vallées ». L’exil des Huguenots avait, dès le XVIe siècle, créé des églises en Angleterre, en Allemagne et dans les Provinces Unies vers lesquelles nombre de protestants français fuirent après la Révocation de l’Edit de Nantes. Sur environ un million de protestants, le quart va prendre les routes de l’exil. Le gros de l’exode de 1685 arrive dans la République de Genève et dans le Canton de Neuchâtel où les exilés sont logés, soignés. Le raz de marée de 1686-87 touchera les petits états allemands (surtout l’Electorat de Brandebourg), les Provinces Unies, l’Angleterre et même les USA. Beaucoup vont s’assimiler tout en valorisant et cultivant leurs racines grâce à des Eglises françaises qui vont les accueillir sur le plan religieux et les aider matériellement. D’autres – notamment de nombreux agriculteurs – deviendront des déracinés errant d’église en église.

Pour écouter l’enregistrement de la soirée de lecture :

L'exode Huguenot

par Michelle Magdelaine